Canards de bain : ces vilains petits jouets remplis de bactéries

Publié le 28 mars 2018 à 12:21 Aujourd'hui

Les canards que l’on utilise dans notre bain seraient de véritables nids à bactéries, selon une étude menée par des chercheurs de l’Eawag de l’EPF de Zurich et de l’Université de l’Illinois, et publiée mardi 27 mars 2018. 

Lorsque sonne l’heure du bain, les enfants sont nombreux à vouloir barboter avec leurs jouets. Parmi eux, l’indétrônable canard jaune. Ce dernier est également très apprécié par les plus grands, surement pour d’autres raisons. Cependant attention ! Des chercheurs de l’Institut de recherche sur l’eau (Eawag), de l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPF) et de l’Université de l’Illinois (États-Unis) viennent de révéler les résultats de leur dernière enquête. Celle-ci, publiée dans la revue Nature (en anglais), « montre maintenant que ces jouets si mignons peuvent cacher un cœur menaçant », expliquent les scientifiques dans un communiqué, baptisé ironiquement « Les vilains petits canards de bain ». Et pour cause, « en plus du plastique qui est en soi sujet à caution, les canards de bain offrent en leur sein un milieu favorable à la croissance de nombreuses bactéries ». Le climat des salles de bains étant chaud et humide, ces cellules nocives se trouvent donc dans un climat favorable pour se développer.

Pour arriver à de telles conclusions, les scientifiques ont collecté plusieurs jouets de bain puis ont placé plusieurs jouets neufs dans « des conditions typiques d’une salle de bains normale » pendant onze semaines. Un groupe de canards a ainsi été placé dans de « l’eau potable propre et un autre dans de l’eau de bain usagée contenant donc des restes de savons, de la saleté et de la sueur mais aussi des bactéries accompagnatrices du corps humain », expliquent les chercheurs. Par la suite, les jouets ont été découpés en deux afin d’être étudiés en laboratoire. Le résultat est sans appel : entre 5 et 75 millions de cellules ont été trouvées sur chaque centimètre carré de surface. « Nous avons trouvé beaucoup de bactéries et de champignons, des espèces typiques trouvées dans l’eau potable mais aussi des pathogènes potentiels », indique Lisa Neu, auteure principale de l’étude et microbiologiste dans une vidéo. Plus concrètement, 80% des canards étudiés présentaient des germes « potentiellement pathogènes », notamment « des légionelles et des bactéries très résistantes de l’espèce Pseudomonas aeruginosa, connues pour causer de nombreuses maladies nosocomiales ».

Des bactéries dans le canard et une pièce humide

Face à de tels résultats, les chercheurs ont ainsi voulu comprendre la raison de cet amas de bactéries. Dans un premier temps, ils ont étudié l’eau du robinet. Celle-ci est pauvre en nutriments et ne permet donc pas le développement des bactéries. Les scientifiques se sont ensuite intéressés au canard en lui-même. Ce dernier est, dans l’immense majorité des cas, fait en caoutchouc. Cette matière libère de grandes quantités de carbone organique. Lors d’un bain, plusieurs nutriments dont de l’azote et du phosphore, ainsi que des bactéries émanant du corps humain, de la saleté du baigneur et des produits utilisés sont libérés. Pour Frederik Hammes, qui encadre ces travaux, ces jouets sont « à l’interface entre eau potable, plastiques, pollutions exogènes et personnes sensibles », il est donc normal de trouver de tels résultats. Comprenez par « personnes sensibles », « les (jeunes) enfants qui adorent s’asperger d’eau en la faisant gicler de leur canard ». D’ailleurs, lorsque les petites têtes blondes s’amusent avec leur canard en appuyant sur le ventre, « il n’est ainsi pas rare que le jet soit de couleur brune », de par la présence de bactéries. « Cela peut renforcer leurs défenses immunitaires. À ce moment-là, c’est plutôt positif », commente Frederik Hammes cité dans le communiqué. « Mais cela peut également provoquer des irritations des yeux et des oreilles ou des infections gastro-intestinales plus problématiques », poursuit-il.

Qui plus est, il ne faut pas oublier que la salle de bains est une pièce principalement chaude et humide. Les cellules nocives sont donc dans un environnement idéal pour se reproduire et se développer, que ce soit sur le bas des rideaux de douche ou dans les jouets en plastique utilisés dans le bain. Pour lutter contre la prolifération de ces bactéries, une seule solution est préconisée par Frederik Hammes : « durcir la réglementation sur les polymères utilisés dans la fabrication des canards ».

 

Crédits photos : Eawag

 

Marie Bascoulergue

Sur le même thème