CDD : ce qui risque de changer

Publié le 27 juillet 2017 à 16:10 Aujourd'hui

Le gouvernement souhaite donner plus de pouvoir et de flexibilité aux entreprises en leur laissant la possibilité de gérer eux-même la régulation des contrats à durée déterminée (CDD). Une proposition très bien accueillie par les organisations patronales, mais qui risque bien d’accentuer la précarité des salariés.

Dans le cadre de la réforme du code du travail, le gouvernement envisage de laisser les secteurs d’activité réguler les contrats à durée déterminée (CDD). Selon lui, cette réforme permettrait de « tenir d’avantage compte de la diversité des situations » dans le monde de l’entreprise. Muriel Pénicaud, ministre du Travail de l’emploi et de la solidarité sociale, s’est exprimée sur le sujet lors de l’examen du projet de loi au Sénat qui devrait permettre au gouvernement de légiférer par ordonnance et ce, dès la rentrée. Bonne nouvelle pour les patrons certes, mais mauvaises pour les salariés et les syndicats qui voient cette réforme d’un très mauvais œil.

Aujourd’hui, en France, c’est l’article L-1242-1 du code du travail que fixe les règles du jeu. « Un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ». Ainsi le CDD peut être signé afin de remplacer un salarié absent ou pour favoriser l’accroissement temporaire d’une entreprise. Celui-ci, pour le moment, ne peut être renouvelé que deux fois et ne peut dépasser dix-huit mois. À savoir que la loi prévoit aussi des périodes de carence, un laps de temps ou l’employeur ne peut faire signer de CDD à un employé.

Le gouvernement actuel juge ces règles bien trop strictes et souhaite les assouplir, du moins, plutôt laisser la possibilité aux entreprises de choisir son fonctionnement. Le projet de loi indique qu’il s’agirait « d’ouvrir les possibilités de négociation au niveau de la branche en matière de réglementation relative au CDD et au travail temporaire, en ce qui concerne les motifs de recours à ces contrats, leur durée et leur succession sur un même poste ou avec le même salarié ».

Un projet de loi qui ne plaît pas à tout le monde

Cette mesure semble réjouir la grande majorité des organisations patronales. Jusque-là rien de bien étonnant. Selon les syndicats des patrons, cette réforme pourrait se traduire par un « allègement du formalisme », un « allongement de la durée maximale des contrats » et la suppression du délai de carence ». Un avis qui n’est absolument pas partagé par la CGT qui s’inquiète. « Les mesures envisagées sont toutes régressives et taillées sur mesure pour satisfaire aux exigences patronales (…) Il s’agit aussi de brouiller les repères collectifs, jusque-là communs à tous et consignés dans le code du travail et les conventions collectives, et instituer un contrat de travail, avec des règles différentes dans chaque profession », indique-t-elle dans un communiqué.

Et les syndicats ne sont pas les seuls à s’inquiéter. C’est le cas du président du groupe Gauche démocrate et républicaine André Chassaigne. « Comment on peut penser qu’on créera plus d’emplois dans la durée en développant d’avantages les CDD au détriment des CDI ? On a le sentiment d’avoir moins de chômage au niveau quantitatif, mais on se rend compte qu’en définitive, la baisse du chômage se fait avec un éclatement de contrats précaires » s’indignent-ils sur la chaîne LCI. À noter que l’INSEE a réalisé une enquête auprès de patrons, et ce qui est ressorti c’est que cette rigidité du code du travail dénoncé par le gouvernement d’Emmanuel Macron est loin d’être la cause qui explique ce frein à l’embauche.

D’ailleurs, selon le bureau statistique du ministère du Travail, les CDD représentent plus de 85% des embauches. Un chiffre stable qui inquiète quand on sait que les CDD sont des freins pour trouver un logement ou pour contracter des prêts. Alors cette mesure qui en énerve plus d’un passera-t-elle l’épreuve de la rentrée ? La CGT a déjà lancé un appel à la grève dans toutes les entreprises et les services le 12 septembre. Quant à Jean-Luc Mélenchon, celui-ci lance un grand rassemblement populaire le 23 septembre à Paris. La saga du code du travail est loin d’être clôturée.

Jade PANOSSIAN

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