Découpes de poisson : encore trop d’anomalies !

Publié le 10 avril 2018 à 11:48 Aujourd'hui

La DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a publié le 9 avril 2018 les résultats de son enquête sur le contrôle des découpes de poisson. Elle a constaté des anomalies quant à l’étiquetage et au traitement des poissons.

Chaque année, plus de 13 millions de tonnes de poisson sont consommées en Europe. Un français ingère en moyenne 35 kg de poisson par an, faisant de la France le 5ème plus gros consommateur européen, selon les statistiques Planetoscope. En cinquante ans, le poisson est devenu un produit de consommation de masse, passant de 20 milliards de kilos en 1950 à 132 milliards (!) en 2010. Alors que sa consommation est très forte, on peut se demander si son traitement est vraiment éthique. Ces dernières années, des contrôles ont mis en avant des manquements, comme l’utilisation d’additifs non autorisés ou non déclarés et l’ajout d’eau dans les découpes. En 2014, une enquête de l’Association nationale des consommateurs et usagers précisait que moins de 10% des distributeurs précisait la zone de pêche d’origine de sa production. Dès lors, peut-on se fier aux étiquettes quant à la nature et au traitement de l’animal aquatique ? Pour approfondir la question, la DGCCRF a mené l’enquête en 2016, durant laquelle elle a inspecté 250 établissements et analysé 103 prélèvements. Selon son étude, le taux d’anomalies s’élève à 23%, un résultat auquel s’ajoutent 86 avertissements, 22 injonctions et 32 procès-verbaux.

Les actions de contrôle ont porté sur les règles d’étiquetage, la délivrance et le formalisme des factures, la provenance et l’origine du produit, la présence d’additifs, la traçabilité et l’hygiène et la sécurité. Sur les 250 établissements analysés, la priorité a été donnée aux distributeurs, puis aux commerces de gros, aux mareyeurs et aux transformateurs. Cette enquête de fond a révélé de nombreuses anomalies portant sur les longes de thon et d’espadon. Les manquements portent principalement sur la dénomination du produit, comme l’absence de la mention « décongelé », des étiquetages qui ne précisent pas formellement que le poisson a été traité, pouvant même laisser penser le contraire, et l’ajout d’eau et d’additifs, avec des doses de nitrites et nitrates qui dépassent le seuil autorisé.

Des manipulations illégales

Comme le souligne le rapport, « l’injection d’acides organiques et d’extraits de végétaux riches en nitrites/nitrates est utilisée pour modifier la couleur du poisson et ainsi tromper le consommateur sur la fraîcheur du produit ». Les oublis d’étiquetage ou les ajouts d’additifs des distributeurs ont pour but de vendre davantage de marchandises même si elles ne sont pas de première fraîcheur, et cela au détriment de la santé du consommateur. Des manipulations qui sont illégales. En décembre 2013, la DGCCRF avait établi les règles concernant l’étiquetage des produits issus de la mer et l’aquaculture. Pour l’étiquetage du produit destiné au consommateur, le producteur doit obligatoirement préciser la dénomination commerciale, le nom scientifique, la méthode de production, la zone de pêche ou le pays d’élevage dont sont issus les poissons.

Ainsi, dans le cas de « découpes décongelées injectées avec du sel, de l’eau et des additifs, présentées comme des produits bruts non traités », des suites administratives et pénales sont mises en oeuvre. L’enquête fait référence à une infraction représentative : « un professionnel vendant des filets de saumon kéta du Pacifique salés (composés de saumon kéta du Pacifique décongelé, injecté avec une solution d’eau, de sel, de lactate de potassium et d’acétate de potassium) a fait l’objet d’un procès-verbal.  La composition du produit était bien indiquée mais la présentation générale, avec au recto la seule mention « saumon sauvage » pouvait faire croire à un saumon sans traitement. Un consommateur a par ailleurs saisi la DDPP (Direction départementale de la protection des populations) au sujet de ce même produit, pensant avoir acheté du saumon nature et non un produit déjà salé ».

Claire Lebrun

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