Pesticides : certains labels jugés trompeurs pour les consommateurs

Publié le 13 mars 2018 à 16:17 Aujourd'hui

Les labels alimentaires présents sur les fruits et les légumes induiraient les consommateurs en erreur. C’est ce que dénoncent quinze associations à travers une tribune publiée vendredi 9 mars 2018. Dans leur ligne de mire : la nouvelle certification « zéro résidu de pesticides ». 

Depuis plusieurs années, l’envie de certifier la qualité d’un produit ou d’un service est de plus en plus répandue. C’est dans l’agroalimentaire que les labels sont les plus nombreux. Label Rouge, AOC, AOP, IGP, STG, AB, Fairtrade,  ce n’est pas ce qui manque. Le dernier label en date : le « zéro résidu de pesticides« . C’est justement celui qui fait débat. Dans une tribune publiée le vendredi 9 mars dernier, quinze associations environnementales dénoncent l’aspect « trompeur » de cette nouvelle certification. Parmi les signataires, Attac France, France Nature Environnement, Générations Futures, Greenpeace, LPO ou encore WWF. Concrètement, ils pointent du doigt la démarche du collectif « Nouveaux Champs » qui revendique le « zéro résidu » de pesticides. « En plus d’être inexact, cet affichage ne répond absolument pas aux enjeux globaux liés à la réduction de l’utilisation de ces molécules. Et biaise donc les choix des consommateurs désireux de faire attention à ce qu’ils achètent », expliquent les associations.

Un label trompeur

France Nature Environnement, Générations Futures, Greenpeace et les autres assurent qu’il est impossible de « garantir qu’un aliment ne contient aucun résidu », précisant que « pour trouver une molécule, il faut la chercher ». Les signataires affirment qu’il est seulement possible de préciser « qu’aucun des pesticides cherchés n’a été trouvé ». Autrement dit, cela garantit qu’un aliment ne contient pas les pesticides recherchés mais pas qu’il en est exempt totalement. Les associations indiquent donc que « zéro résidu » signifie en réalité « zéro résidu parmi les X qui ont été recherchés… ». C’est justement ce que déplore François Veillerette, directeur de l’association Générations Futures au micro de RTL : « c’est marqué en tout petit, en-dessous de « zéro résidu quantifié », c’est-à-dire ceux qui sont au-dessus d’un certain niveau et que les laboratoires savent mesurer. Donc ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de résidu de pesticides, mais qu’ils sont assez faibles pour que les labos ne sachent pas les doser ». D’ailleurs, les résultats d’analyses peuvent varier « jusqu’à 50 % en fonction du laboratoire et des méthodes utilisées ». Interrogé par Le Parisien, le collectif garantit des tests « à spectre très large », précisant que 250 à 1 000 molécules sont passées au crible. « Nous recherchons tous les pesticides chimiques homologués depuis dix ans pour chaque espèce. Nous testons aussi les contaminations croisées », assure Gilles Bertrandias, le président du collectif.

Les associations rappellent également que l’absence de trace de pesticides une fois les produits en rayon ne signifie pas « qu’ils n’ont pas été aspergés quand ils étaient aux champs ». Une critique que réfute Gilles Bertrandias dans les colonnes du Parisien. Selon lui, « des tomates bio peuvent très bien contenir plus de pesticides parce qu’elles seraient contaminées par l’épandage de produits phytosanitaires sur les champs voisins » alors que les légumes « zéro résidu de pesticides » peuvent être traités chimiquement avant la récolte et ne plus avoir de traces lors de la commercialisation. Cependant,  ces pesticides sont souvent volatils et finissent dans l’air voire dans les eaux, mettant ainsi à mal la santé des riverains, des agriculteurs et de l’écosystème. D’ailleurs, 92% des cours d’eau testés sont actuellement contaminés.

Privilégier l’agriculture biologique ou l’agroécologie

Pour France Nature Environnement et les autres, « la seule solution pour nous garder loin des pesticides est donc de limiter globalement l’usage de ces molécules ». Pour cela, les consommateurs peuvent agir en privilégiant les produits issus de l’agriculture biologique, « qui n’utilise aucun pesticide de synthèse » ou ceux de l’agroécologie qui réduit « l’usage des pesticides ». Ce concept est d’ailleurs reconnu par la « Haute Valeur Environnementale », une certification environnementale officielle. Au niveau national, les associations invitent le gouvernement et la grande distribution à prendre leurs responsabilités, notamment « en accompagnant les agriculteurs vers une réduction de leur usage des pesticides, mais aussi en s’engageant, envers les consommateurs, à ce que l’information (origine des produits, pesticides utilisés, etc.) soit transparente ».

Marie Bascoulergue

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