Abeilles : la nocivité des néonicotinoïdes a été confirmée

Publié le 30 juin 2017 à 13:20 Aujourd'hui

La nocivité des néonicotinoïdes vient d’être confirmée par deux expériences menées en Europe et au Canada. Publiés jeudi 29 juin, ces travaux démontrent que l’environnement local et l’état de santé des ruches peuvent moduler les effets des néonicotinoïdes.

Les abeilles sont en danger, cette information ne date pas d’aujourd’hui. On soupçonnait les dangers des néonicotinoïdes, maintenant ils sont confirmés. Des chercheurs du Centre pour l’écologie et l’hydrologie (CEH) ont publié jeudi 29 juin deux études dans la revue Science. Cette expérience à grande échelle avait pour but d’évaluer les impacts des néonicotinoïdes sur les abeilles en Europe et au Canada.

Première étude : le taux de survie des ruches pendant l’hiver est faible.

L’expérience s’est déroulée au Royaume-Uni, en Allemagne et en Hongrie. C’est partiellement financée par le secteur de l’agrochimie que l’étude a pu être menée sur plus de 3000 hectares. Celle-ci a exposé trois espèces d’abeilles aux récoltes de colza d’hiver dont les semences avaient été traitées avec de la clothianidine néonicotinoïde de l’entreprise Bayer CropScience et du Thiaméthoxane de Syngenta. Ces substances font partie des trois néonicotinoïdes interdits temporairement dans l’union européenne et ce, depuis 2013. Cela est notamment dû aux craintes de leurs effets sur la santé des abeilles. À noter qu’un nouveau projet de loi prévoit de les bannir définitivement des champs européens. Quant aux serres, la question n’est pas encore d’actualité.

Pourtant, les chercheurs ont constaté qu’une exposition à ces récoltes infestées de pesticides réduisait le taux de survie des ruches pendant l’hiver. En Hongrie, la population des ruches a diminué de plus de 24% au printemps. Au Royaume-Uni, le taux de survie est au plus bas dans les ruches où les abeilles ont été en contact avec le colza traité à la clothianidine. Quant aux ruches en Allemagne, les chercheurs ont constaté que les pollinisateurs étaient beaucoup moins touchés.

« Les néonicotinoïdes, objets de cette étude, ont réduit la capacité des trois espèces d’abeilles à se reproduire et à établir de nouvelles populations l’année suivante, tout au moins au Royaume-Uni et en Hongrie », indique Ben Woodcock, entomologiste pour le CEH. Selon les chercheurs, les différences d’impact de ces néonicotinoïdes sur la viabilité des ruches entre les trois pays pourraient s’expliquer par l’accès plus ou moins grand à d’autres plantes. Ils supposent aussi que cela est dû à l’état de santé des ruches.

Par exemple, en Allemagne, les ruches avaient des populations bien plus grandes et en meilleure santé. Les abeilles avaient aussi un accès à de nombreuses fleurs sauvages. Malgré toutes ces conditions, dans les trois pays, le faible taux de reproduction est bien lié aux niveaux élevés de résidus de néonicotinoïdes dans les ruches.

Seconde étude : l’espérance de vie des abeilles réduite de 23%

L’étude menée au Canada a démontré que les abeilles en contact avec les néonicotinoïdes mouraient plus tôt et que toute la colonie était impactée par ces pesticides. Les abeilles exposées à du pollen traité avec ces insecticides pendant les neuf premiers jours de leur vie voyaient leur espérance de vie réduite de 23%. Un chiffre qui fait froid dans le dos. Les colonies se retrouvaient donc incapables de maintenir de bonnes conditions au sein de la ruche, et la reine ne pouvait plus pondre.

Les chercheurs ont travaillé sur onze ruches. Cinq d’entre elles étaient proches d’un champ de maïs dont les semences avaient été traitées avec des néonicotinoïdes. Quant aux six autres ruches, elles étaient assez loin des cultures agricoles. Chaque ruche a été étudiée et examinée minutieusement entre début mai et septembre 2016. Les scientifiques ont également constaté la présence de néonicotinoïdes dans les plantes situées à proximité. « Cela indique que les néonicotinoïdes qui se dissolvent dans l’eau se propagent dans l’environnement », explique Nadia Tsetkov, une des chercheuses de l’étude.

Ces deux études montrent bien le danger que représente l’utilisation de ces pesticides. Les abeilles en souffrent et les gouvernements ne peuvent plus permettre l’utilisation de ces produits dangereux pour la faune et la flore. Mais il est important de rappeler que l’interdiction de ces produits ne sauvera pas les abeilles. Celles-ci sont menacées par de nombreux autres facteurs comme le Varroa destructor (parasite qui détruit les ruches) et le réchauffement climatique. Toutefois, il n’est pas inconsidéré d’interdire les néonicotinoïdes et de sensibiliser afin d’éviter l’abus des pesticides en général. Ils sont aussi mauvais pour l’environnement que pour l’Homme.

Pour rappel, la France a interdit l’utilisation de ces pesticides l’année dernière. La législation sera effective à partir de 2018.

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Alice Glaz

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