Accord de Paris : Donald Trump abandonne le climat

Publié le 2 juin 2017 à 11:55 Aujourd'hui

Onde de choc. Donald Trump l’avait promis lors de sa campagne… Les États-Unis se retirent de l’accord de Paris. Au nom de la défense des emplois américains, Donald Trump a détruit une partie de l’héritage de Barack Obama et fait un pas en arrière dans la lutte contre le réchauffement climatique. 

Les États-Unis avaient signé et ratifié l’accord de Paris sur le climat lors du mandat de l’ancien président Barack Obama. Celui-ci s’était engagé à ce que l’Amérique réduise ses émissions de gaz de 26 à 28% d’ici 2025. Les signataires s’étaient engagés à réduire à -2 degrés le réchauffement mondial. Mais la nouvelle est tombée. Après plusieurs mois de réflexions, Donald Trump a brisé le suspens jeudi 1er juin, en annonçant la sortie des États-Unis de l’accord de Paris sur le climat. Et cette nouvelle risque bien de bousculer les 194 autres membres signataires. « Afin de remplir mon devoir solennel de protection de l’Amérique et de ses citoyens, les États-Unis se retireront de l’accord de Paris sur le climat », a annoncé Donald Trump depuis la Maison Blanche. Il espère que rien ne le mettra en travers de son action pour remonter l’économie du pays. Mais le nouveau président américain se dit prêt à négocier un nouvel accord, moins sévère envers les États-Unis.

L’Amérique est le deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre après la Chine. Pourtant cette décision a une portée qui va bien au-delà de la question climatique. Donald Trump entend bien réaffirmer la place des États-Unis comme leaders mondiaux. Or « l’accord de Paris se fait au détriment des États-Unis. Il pourrait coûter 2,5 millions d’emplois d’ici 2075 », a indiqué Donald Trump. Selon lui, des pays tels que la Chine et l’Inde seraient avantagés grâce à cet accord et dénonce un accord « pas assez dur avec la Chine et l’Inde ».

Quelles conséquences ?

Sur le réchauffement climatique, le retrait des États-Unis aura de réels effets. Comme l’indique Europe 1, une simulation pour mesurer ces effets a été réalisée par des chercheurs de l’organisation Climate Interactive. Selon leurs projections, la quantité de gaz à effet de serre pourrait augmenter de 3 milliards de tonnes d’équivalent CO2 par an d’ici 2030. Ce qui aura pour conséquence une hausse de 0,3°C sur les 3°C prévus par les scientifiques. Une autre projection, réalisée par l’organisation Climate Action Tracker table, elle, sur un réchauffement de 0,1 à 0,2°C lié aux États-Unis.

La sortie des États-Unis pourrait avoir un effet « boule de neige » sur les autres pays qui ont ratifié l’accord. « Il faudrait qu’une coalition de pays, dont la France et des pays du G20 fassent un effort diplomatique pour éviter que le Japon, l’Australie ou l’Arabie saoudite ne soient tentés de revenir sur leurs engagements de 2015. Auquel cas l’accord serait détricoté », explique Célia Gautier, responsable des politiques européennes et internationales au sein du Réseau Action Climat à Europe 1. Mais que l’on se rassure l’Union Européenne et la Chine, les deux principaux émetteurs de C02, ont rappelé mercredi qu’ils soutiendraient l’accord de Paris sur le climat. Quant à la Russie, sa position sera suivie de près. En effet, le pays n’a toujours pas ratifié l’accord. Sur le plan financier, le retrait des États-Unis pourrait alourdir la facture pour l’Union Européenne et les autres pays leaders. Ils devront s’acquitter de 3 milliards de dollars supplémentaires (la contribution des États-Unis) sur les 100 milliards prévus (89 milliards d’euros) pour les pays en développement à partir de 2020.

Afin de se libérer de cet accord, les États-Unis devront patienter trois ans à partir de son entrée en vigueur, puis devront respecter un préavis d’un an. Ils ne pourraient pas se retirer avant la fin 2020, soit au lendemain de la prochaine élection américaine… Toutefois, comme le rappelle Libération, une faille dans l’accord permet d’éviter ce délai, « en sortant de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC) ». L’accord de Paris, tout comme le protocole de Kyoto, sont « intégrés » à cette convention votée en 1992, explique 20 Minutes. En la quittant, le pays mettra automatiquement fin à sa participation à l’accord de Paris en un an seulement.  Reste que cette décision nécessiterait l’accord du Sénat américain, que Donald Trump ne serait pas certain d’obtenir, précise 20 Minutes.

Vives réactions

En tout cas, cette annonce a fait trembler Internet. Il n’a pas fallu attendre pour lire les interventions de politiques et autres personnalités importantes. Barack Obama est l’un des premiers à s’être exprimé en publiant un communiqué. « J’estime que les États-Unis devraient se trouver à l’avant-garde. (…) Mais même en l’absence de leadership américain, même si cette administration se joint à une petite poignée de pays qui rejettent l’avenir, je suis certains que nos états, villes et entreprises seront à la hauteur et en feront encore plus pour protéger notre planète pour les générations futures”. Emmanuel Macron, lui, a déclaré que ce retrait de l’accord était « une faute pour l’avenir de notre planète car « il n’y a pas de planète B ». Et de conclure :  « rendons sa grandeur à notre planète », un joli clin d’oeil au slogan présidentiel de Trump : « rendons sa grandeur à l’Amérique » (Make America great again). La chancelière allemande, Angela Merkel a dit “regretter “ la décision américaine et a appelé à poursuivre “la politique climatique qui préserve notre terre”. L’ancien président de la République française François Hollande a pour sa part mentionné dans un communiqué que « ce qui s’est produit à Paris est irréversible ». Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a fait part au président américain de”sa déception” lors d’un entretien téléphonique.

Laurent Fabius, qui avait présidé la COP21, a, lui aussi, dénoncé « une faute honteuse et une erreur majeure », soutenue par « un lot de mensonges ». L’ancienne ministre de l’environnement Ségolène Royal a qualifié de “très grave délit contre l’humanité” la décision de Donald Trump. Pour la maire de Paris Anne Hidalgo, “en retirant les États-Unis de l’Accord de Paris, le Président Trump commet aujourd’hui une erreur aux conséquences dramatiques fatale”, a-t-elle indiqué dans un communiqué. Jeudi soir, l’Hôtel de Ville de Paris a vu sa façade s’éclairer en vert. Un beau symbole. Ce vendredi, sur Europe 1, le ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot a estimé que le retrait des États-Unis de l’accord de Paris était “une forme d’injure à l’avenir”. « Tourner le dos aux faits n’empêchera pas les faits de nous rattraper », a-t-il affirmé. Il a aussi précisé : « l’accord de Paris n’est pas mort ». Un peu plus tard, sur BFMTV, le ministre a estimé que la France allait désormais reprendre « le leadership diplomatique. »

De nombreuses personnalités du monde économique ont fait part de leur déception, et ont insisté sur l’urgence d’agir face au réchauffement. Parmi eux, Elon Musk, le PDG de Tesla et  défenseur des énergies renouvelables, qui a immédiatement annoncé qu’il quittait le groupe des grands patrons conseillant Donald Trump. « Le changement climatique est réel. Quitter Paris n’est pas bon pour l’Amérique et le monde » a-t-il indiqué dans un tweet. Il a été rejoint par Robert Iger, le PDG de Disney. Jeff Immelt, le patron de General Electric (qui ne fait pas partie du cercle de conseillers du président américain) a aussi condamné la décision de Donald Trump. « Je suis déçu par la décision sur l’accord de Paris. Le changement climatique est réel. L’industrie doit maintenant prendre la tête et ne plus dépendre du gouvernement », a-t-il écrit sur Twitter.

 

Alice Glaz

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