Alerte sur l’état des coraux dans le Pacifique
Publié le 8 septembre 2017 à 12:36 Aujourd'hui
Arrivée à mi-parcours de ses travaux, la mission Tara Pacific donne des nouvelles plutôt inquiétantes. Les coraux tropicaux sont fortement impactés par l’Homme et blanchissent de plus en plus vite. Ils deviennent les écosystèmes les plus menacés de la planète.
Il y a un peu plus d’un an, la goélette Tara est partie de Lorient pour une expédition de plus d’un an. Le but ? Parcourir les eaux du Pacifique afin d’observer le fonctionnement et la diversité des récifs coralliens. Les scientifiques ont sondé leur état de santé et leur évolution face aux changements climatiques. Aujourd’hui, le bateau a parcouru plus de 50 000 km, du canal du Panama à la Nouvelle-Zélande, en passant par le Japon. Il a réalisé 2000 plongées et collecté près de 15 000 échantillons. À terme, les chercheurs prévoient de collecter plus de 35 000 échantillons provenant de 40 archipels.
Mais à mi-chemin, les scientifiques apportent une mauvaise nouvelle. « Nous avons pu constater un blanchissement massif des coraux sur l’ensemble du Pacifique. Si quelques sites sont indemnes comme aux îles de Wallis et Futuna, la couverture corallienne a été affectée à hauteur de 30% dans certaines îles des Tuamotu, jusqu’à 90% aux Samoa », explique Serges Planes, biologiste marin et directeur scientifique de Tara Pacific, dans le communiqué de l’organisation.
Le réchauffement climatique mis en cause par les scientifiques
Les scientifiques ont cherché les causes du blanchiment des coraux. Selon ces derniers, la température moyenne de l’eau et la durée d’exposition à cette haute température sont mis en cause. Dans les zones très peu peuplées et chimiquement très peu polluées, comme la Polynésie française, seule la hausse des températures a pu induire une telle dégradation. « Plus l’augmentation de la température dépasse les normales attendues, et plus les durées d’expositions à ces fortes températures de l’eau sont longues, plus le blanchiment est fort », indique Serge Planes.
« Cette mortalité prématurée et massive n’est plus due à des épisodes ponctuels ou cycliques de hausse de températures comme El Nino, mais bien à un réchauffement global de l’océan, auquel s’ajoutent des périodes estivales très chaudes, de moins en moins espacées d’année en année », précise le chercheur. En effet, en état de stress intense, les coraux voient les cellules de leur corps mou, protégé dans un squelette externe calcaire, expulser les algues qu’elles hébergent. Insuffisamment nourri, le corail peut résister deux à trois semaines avant de blanchir, puis mourir de faim. Malheureusement ce phénomène semble irréversible.
Trouver des solutions
L’autre objectif de Tara Pacific est d’étudier les stratégies que les coraux pourraient mettre en oeuvre pour résister à cette élévation de la température de l’eau, ainsi qu’à son acidification. Plusieurs hypothèses ont été avancées par les chercheurs. Des scientifiques français ont publié des observations sur une potentielle capacité d’adaptation. Les coraux vivant en zone volcanique pourraient développer un métabolisme leur permettant de survivre à un tel environnement.
Mais le principal remède est de mettre fin au réchauffement climatique. Une action qui risque de prendre beaucoup de temps et qui est loin d’être certaine. « Limiter le réchauffement climatique à 2°C comme acté dans l’Accord de Paris COP 21 de décembre 2015 est bien loin d’être suffisant pour les écosystèmes marins », explique Romain Troublé, directeur général de la Fondation Tara Expéditions. « Plus concrètement, il faut limiter au maximum les aménagements côtiers. Comme par exemple la construction de nouveaux ports, de digues, stopper les pollutions locales, l’usage du fioul lourd riche en soufre pour les navires, les apports terrigènes intempestifs », indique Serge Planes.