Exposition prénatale : les perturbateurs endocriniens affectent le comportement des petits garçons

Publié le 2 octobre 2017 à 12:52 Aujourd'hui

Une étude menée par l’Institut français de la santé et de la recherche médicale (Inserm) révèle que les petits garçons seraient plus sujets à des troubles du comportement. Cela serait dû à l’exposition de la mère, à des perturbateurs endocriniens durant sa grossesse. 

Selon une étude menée par l’Inserm et publiée le 15 septembre 2017 dans la revue américaine Environmental Health Perspectives, les garçons de 3 à 5 ans exposés in utero à des perturbateurs endocriniens auraient, plus fréquemment, des troubles du comportement. Pour cela, 529 femmes enceintes ont été sélectionnées entre 2003 et 2006 dans les hôpitaux de Nancy et Poitiers. Afin d’établir un lien entre des anomalies congénitales des organes reproducteurs et l’exposition aux perturbateurs endocriniens, déjà établis chez certains animaux, les scientifiques se sont focalisés uniquement sur les garçons lors de cette étude. Les petites filles pourront également faire l’objet d’une enquête dans les prochaines années.

Hyperactivité, troubles émotionnels et relationnels

Sont concernés parmi les perturbateurs endocriniens (PE) le bisphénol A, le triclosan et le DPB. Des échantillons d’urine prélevés lors de la grossesse permettent d’affirmer que plus de 70% des femmes sont exposées à des PE durant leur grossesse. Ce serait la cause des troubles du comportement des garçons de 3 à 5 ans. Pour comprendre, les chercheurs ont demandé aux mamans de répondre à un questionnaire lors du 3 ème et 5 ème anniversaire de leur enfant. Le but était d’évaluer l’hyperactivité, les troubles émotionnels et relationnels ainsi que la conduite et l’inattention de ces derniers. Le résultat est sans appel « l’exposition au bisphénol A était associé à une augmentation des troubles relationnels à 3 ans et des comportements de type hyperactifs à 5 ans » rapporte l’Inserm. « Le métabolite du DPB était lui associé à davantage de troubles émotionnels et relationnels, incluant les comportements de repli, à 3 ans, mais pas à 5 ans pour les troubles émotionnels«  ajoute l’institut. Les chercheurs expliquent également que le lien entre l’autisme et l’exposition aux PE n’a pu être établi dans cette enquête. Pour y parvenir il faudrait un échantillon de plusieurs dizaines de milliers d’enfants.

Interdire ces substances chimiques

Ces perturbateurs endocriniens sont principalement présents dans les dentifrices, les vernis à ongles ou encore certains savons. Depuis plusieurs années, l’Union Européenne tente de limiter, voire d’interdire leur utilisation. Utilisé depuis plus de 50 ans dans l’industrie du plastique, le bisphénol A est interdit en France dans tous les contenants alimentaires depuis janvier 2015. Dès 2011 l’Agence nationale de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommande de réduire son utilisation. L’année suivante, l’organisme propose à l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) de classer cette substance chimique comme toxique pour la reproduction. Proposition adoptée par la Commission Européenne en juillet 2016. La même année, l’Anses obtient la restriction de l’utilisation du bisphénol A dans les produits grand public dans le cadre du règlement REACh, prévoyant d’identifier des substances comme « extrêmement préoccupantes ». Le 16 juin 2017, l’ECHA reconnait officiellement le bisphénol A comme perturbateur endocrinien. Concernant le triclosan, il est jugé dangereux par le Commission Européenne et interdit partiellement par l’Union Européenne. La substance est autorisée dans certains cosmétiques jusqu’à une certaine dose, explique Rémy Slama, directeur de recherche à l’Inserm à France Info. Son caractère antibactérien ne lui permet pas d’être interdit totalement. Pour maintenir sa présence « il faudrait vraiment s’assurer qu’il y a un bénéfice sanitaire important » explique le chercheur. Les résultats de cette étude ne prennent donc pas en compte les récentes restrictions de ces substances chimiques.

Marie Bascoulergue

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